La fourchette est une attaque double qui consiste donc à menacer simultanément deux unités du camp adverse.
Trouver une parade à une menace limite déjà grandement le choix des coups, mais quand il y a deux menaces il devient le plus souvent impossible de trouver un coup salvateur dali.
Diagramme 1, trait aux blancs
Dans cette position les blancs peuvent gagner une pièce,
tour ou cavalier, en avançant leur pion f : après
1.f4 !
on dit que le pion blanc fait une "fourchette" aux deux pièces noires.
Diagramme 2, trait aux noirs
Dans ce deux fourchettes successives ont raison de la dame blanche :
Les noirs jouent habilement
1...f3+ !
et la situation des blancs est cruelle : soit ils jouent 2.Dxf3
et ils sont victimes de la fourchette de cavalier 2...Ch4+
suivie de 3...Cxf3 , soit ils répliquent 2.Rxf3 , et
c'est par 2...Cd4+ qu'ils perdent la dame.
Diagramme 3, trait aux blancs
Dans ce diagramme les blancs capturent le fou adverse
grâce au coup 1.Dg4 ! qui menace simultanément
2.Dc8 mat et 2.Dxb4. Les noirs doivent d'abord parer
le mat, et vont donc perdre le fou.
Diagramme 4, trait aux noirs
Cette situation montre une partie à peine entamée où
déjà les blancs perdent une pièce
1...e5 ! 2.Fxe5 Da5+ !
et les blancs doivent parer l'échec au roi, ce qui
laisse le temps à leur adversaire de capurer le fou par
3...Dxe5.
Diagramme 5, trait aux blancs
La position suivante, tirée de la pratique, montre une attaque double
préparée par un joli sacrifice :
La case e5, croisement des diagonales a1-h8 et h2-b8,
inspira aux blancs le coup :
1.Tb8 !!
profitant du fait que le fou noir ne peut capturer la tour.
Après la réplique forcée
1...Txb8 vint l'attaque double
2.Fxe5+
sur le roi et la tour. La suite 2...Rg8 3.Fxb8 convainquit les noirs
qui ont un fou de moins et une fin de partie perdante, d'abandonner.
(Rosenblatt - Wolk, 1977.)
Diagramme 6, trait aux noirs
Roi et dame forment des cibles de choix
quand il s'agit de placer une fourchette :
1...Tg1+ !! 2.Rf2
La fourchette 2...Cf3 aurait répliqué à la prise
de la tour aussi bien qu'à 2.Rh2, effectuant même le mat.
2...hxg3+ ! 3.Re3
Ou 3.Re2 Tg2+ ! et la dame est prise
3...Cc4+ !
et les blancs abandonnèrent à la vue de cette fourchette décisive.
(Chandler - P.Littlewood, 1985.)
Diagramme 7, trait aux noirs
Même entre grands champions l'attaque
double peut mettre fin au combat
A la vue de
1...Da6+ !
le grand maître Lajos Portisch abandonna la lutte sans
attendre de perdre un fou après
2.Dc4 Dxa3 !
(Portisch - Ribli, 1985.)
Diagramme 8, trait aux blancs
Beaucoup plus raffinée, tout en étant aussi efficace,
cette combinaison montre un cavalier diabolique, une fois
le terrain préparé pour son intervention :
1.Fxe6+ !!
Le premier d'une série de coups superbes.
1...Fxe6 2.Df8+ !!
Quel coup !
2...Rxf8 3.Cxe6+ !
La première pointe de la combinaison. Les blancs récupèrent
la dame et le fou avec, pour l'instant, le bénéfice
d'un pion.
3...Re7 4.Cxc7 Rd6
Seule façon de protéger le pion d5, mais...
5.Ce8+ !!
Clôture du festival des fourchettes.
5...Re7 6.Cxg7
Le diagramme suivant montre le résultat de cette magnifique combinaison.
Diagramme 9
Le résultat de la combinaison à base de popopopo est édifiant :
deux pions de moins pour les noirs, et leurs pions rescapés
horriblement isolés et affaiblis. D'où...
6...Abandon.
(Seirawan - Kogan, 1986.)
Diagramme 10, trait aux blancs
Tout attaquant doit toujours penser à une possibilité de gain matériel s'il ne peut faire mat. La combinaison qui suit l'illustre bien :
Les noirs espéraient 1.Cxf5 ? Df2+ ! 2.Rh1 Df3+ avec la nullité
par échec perpétuel, mais furent réveillés brutalement par :
1.Dxd6+ !! Rxd6 2.Fe5+
Ce luxe est même permis
2...Re7 3.Cxf5+ ! Rd8 4.Cxh4 Abandon.
(Soyer - Mothes, 1988.)
Diagramme 11, trait aux noirs
La position exposée du couple blanc roi-dame inspire aux noirs l'idée de deux attaques doubles successives :
1...b5 ! 2.Cxb5
Nécessaire pour ne pas perdre une pièce
2...Db7 !! 3.Abandon
Soudainement la dame noire vise le roi blanc par la grande diagonale blanche, ce qui évite toute parade satisfaisante contre l'attaque sur le cavalier en b5. En effet sur chaque tentative la tour noire assènerait un échec à la découverte dévastateur.
(Lief - Wolff, 1987.)
Diagramme 12, trait aux blancs
A nouveau un coup de préparation surprenant va permettre une double menace
1.Txd5 !! exd5
En effet 1...Dxd5 aurait été victime de la fourchette 2.Cxe7+
suivie de la capture de la dame
2.Dg4 !! Abandon.
Puisque les noirs ne peuvent parer à la fois les menaces
2.Dxg7 mat et 2.Ch6+ ! suivie par 3.Dxd7.
(Gaprindachvili - Dlugy, 1987.)
Diagramme 13, trait aux blancs
Un exemple astucieux nous fut fourni par l'ex-champion du monde Boris Spassky :
1.De5 !! Abandon
Impossible de remédier à la fois à 2.Dxb8 et
à 2.f6+ ! suivi de 3.Dxg5.
(Spassky - Hjartarson, 1988.)
Diagramme 14, trait aux noirs
Les fins de partie comportant des cavaliers sont toujours riches de combinaisons. Un exemple :
Les noirs gagnent une pièce :
1...h5+ !! Rxh5
Il n'y avait pas de choix.
2...Txe2 ! 3.Abandon.
Car après 3.Txe2 Cg3+ ! et 4...Cxe2 les noirs
auraient un cavalier de plus et un gain sans problème.
(Pritsker - Balchounov, 1982.)
Diagramme 15, trait aux blancs
La même idée de fourchette, en un peu plus raffinée, nous fût léguée par le grand Lasker :
Les deux cavaliers se déchaînent après un bref préambule :
1.Txc4+ !! Rxc4
Sur 1...bxc4 c'est la fourchette 2.Cc2+ qui décide.
2.Cd2+ ! Rc5
2...Rd4 connaîtrait le même fiasco.
3.Cb3+ ! Abandon.
Car il suit 4.Cxa1.
(Lasker - Duras, 1909.)
Diagramme 16, trait aux blancs
Le panaché de fourchettes de cavaliers et de pions est le summum dans l'art de l'attaque double
1.e6+ ! Dxe6
Le plus résistant puisque 1...Rxe6 laissait le cavalier g6
en prise, et que 1...Fxe6 permettait la fourchette 2.f5 !
2.Fxg6+ ! Rxg6 3.f5+ !
La deuxième fourchette, destinée à dégager la case f4 en
en vue de la troisième fourchette !
3...Fxf5 4.Cf4+ ! Abandon.
Les noirs perdent la dame
(Becker - Jung, 1948.)
Diagramme 17, trait aux noirs
L'alliance de l'action de la dame avec celle du cavalier
ne fait pas mauvais effet non plus
1...Cf3+ !! 2.gxf3
Le cavalier doit être supprimé puisqu'il vise la tour.
2...Dg5+ ! 3.Dg2 Txd2 ! 4.Dxg5 fxg5
et les noirs ont gagné la qualité.
(Delplank - Pardon, 1976.)
Diagramme 18, trait aux blancs
La fin de partie qui suit montre un fou étonnament puissant qui persécute, à coups d'attaques doubles, un roi et sa tour :
1.b7 !
Avec la menace 2.Th8+ ! Rxh8 3.b8=D+ etc...
1...Rg6 2.Te8 !!
D'apparence mystérieuse, ce coup va vite montrer son efficacité.
2...Txb7
Forcé.
3.Txe4 !!
Avec l'idée 3...fxe4 4.Fxe4+ et 5.Fxb7. La tour noire
tente maintenant de se dérober avec un échec au roi,
mais c'est en vain...
3...Tb1+ 4.Rg2 fxe4 5.Fxe4+ Rf6 6.Fxb1 !
Un fou terrible !
(Kieldsen - Emilsson, 1975.)
Diagramme 19, trait aux blancs
Pensez toujours aux fourchettes de cavalier, même s'il n'y a pas de cavalier ! :
1.f7+ ! Rg7
Et non 1...Rf8 ? à cause de 2.Th8+ puis 3.f8=D avec échec
2.Th7+ Rxg6 3.f8=C+ !!
La surprise.
3...Rf6 4.Txd7 !
Et le pion est arrêté.
(Gutman - Feustel, 1982.)
Diagramme 20, trait aux noirs
La double attaque inclut souvent une menace de mat :
Avec un pion de moins et une position d'apparence passive,
le sort des noirs semble scellé, mais ils se rebellent brillamment :
1...Ff3 !!
Stupéfiant mais logique : les noirs menacent à la fois
2...Td1 mat et 2...Dxb6
2.gxf3 Dxb6
Le pion de plus des blancs ne compense pas la qualité perdue
et ils s'inclinèrent rapidement.